A propos du respect de la neutralité des agents des services publics !


Comme le souligne très justement Marc Uyttendaele lors de son exposé au Parlement bruxellois le 30 mai 20221, le débat sur l’interdiction du port des signes convictionnels dans les administrations publiques est pollué par celui sur la laïcité de l’État. Il suffit pour s’en convaincre de se reporter aux débats et conclusions du Parlement de la Région de Bruxelles.

Si l’on examine de près les déclarations de certains partis, la plupart sont des attaques contre les principes de laïcité et de neutralité des services publics, qu’il faudrait adapter, transformer, toiletter pour mieux les dénaturer à défaut de les vider de leur contenu. L’amalgame est entretenu entre sphère publique et sphère privée. D’aucuns invoquent ces mêmes principes en y ajoutant des adjectifs pour mieux les dénaturer. D’autres les instrumentalisent à des fins nauséabondes et xénophobes. Comme dans d’autres pays, la détestation de la laïcité ne connaît ni frontières spirituelles ni politiques. Les adversaires de la laïcité avancent, de moins en moins cachés.

Pour eux,  la liberté de conscience des citoyens, clé de voûte de la laïcité, est rabaissée à n’être plus que la liberté religieuse des communautés de croyants !

Le CLP-KVD tient à rappeler ses positions quant au débat sur la laïcité et donc sur la neutralité des services publics.

La Belgique n’est ni un État laïque puisqu’il reconnaît certains cultes, et depuis 1993 des organisations philosophiques non confessionnelles ni un État neutre puisqu’il ne réserve pas le même traitement à tous les groupes convictionnels.

Le principe de laïcité implique que l’État ne reconnaît ni ne salarie aucun culte ni mouvement philosophique, mais garantit le libre exercice des cultes et convictions philosophiques. Il impose le respect de toutes les croyances et l’égalité de tous les citoyens et citoyennes devant la loi et ce sans distinction de religion. De ceci découle la neutralité de l’État, qui est la garantie de la liberté de conscience – laquelle inclut la liberté de religion – et l’absence de discriminations.

Par conséquent, le principe de laïcité interdit à quiconque (les agents de l’État) de se prévaloir de ses croyances religieuses ou philosophiques pour se soustraire aux règles communes qui régissent les relations entre l’État et ses organes (administrations, services publics) et les usagers. Le principe de neutralité des services publics est le corollaire du principe d’égalité qui régit le fonctionnement des services publics et induit, entre autres, l’égal traitement et l’égal accès des usagers aux services publics. Rappelons que le principe de neutralité ne se cantonne pas au seul champ religieux mais s’impose également aux champs philosophiques et politiques !

Dès lors, les agents de l’État, en contact ou non avec le public, exerçant ou non un pouvoir décisionnel, ne peuvent par conséquent manifester de manière ostensible ou visible leurs convictions, que celles-ci soient philosophiques, politiques ou encore religieuses ! Ce principe suppose à la fois que les agents, en exercice, soient effectivement impartiaux, mais également qu’ils apparaissent comme tels.

Que ferait l’autorité publique si demain, des fonctionnaires et agents des services publics en service portaient un t’shirt vantant l’athéisme, la scientologie… par exemple ? Et si les fonctionnaires, demain, s’organisaient en fonction de leur religion ?

Pour le CLP-KVD, il n’y a aucune raison objective, à traiter de manière différenciée l’une ou l’autre religion, encore moins au nom de la cohésion et du lien. Comment pourrait-il en être autrement alors que les religions forment des entités inconciliables, des identités exclusives. C’est pourquoi, l’indépendance et la neutralité de l’État, garanties par une pratique juridique non-discriminatoire du principe de laïcité, sont indispensables.

Dès lors, peut-on exiger la parfaite neutralité des services publics si l’on ne mène pas le combat pour une véritable séparation de la sphère privée et de la sphère publique ? Poser la question, c’est y répondre !

Rien que la Séparation, mais toute la Séparation !

Par-delà des divergences d’analyse avec d’autres associations, le CLP-KVD appelle à la constitution d’un front commun pour mettre en œuvre la laïcité, tant sur le plan institutionnel que scolaire. C’est un des enjeux de l’Humanité.

Comme l’énonçait D. Diderot dans Pensées sur l’interprétation de la nature : « Plus on suit une mauvaise route, plus on marche vite, plus on s’égare »2

 

Exigeons la Séparation des Églises et de l’État !

A bas le cléricalisme !

A bas les calottes !

Bruxelles, 22 novembre 2022

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1. Neutralité et services publics: Audition devant la commission des Finances et des Affaires générales du Parlement bruxellois
2. Pensées sur l’interprétation de la nature. Principes de politique des souverains. Fragments politiques. p. 168

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