Rock et religion


Notre chanteur de rock (Johnny Hallyday) trépassé et dûment enterré, on aurait pu croire que la saga avait pris fin. Que nenni ! Erreur, grave erreur ! On pourrait presque dire, au contraire, que tout commence, au moins pour certains, tandis que tout continue pour d’autres, même si pour les politiques les jeux sont un peu faits.

Venons-en aux réalités sonnantes et trébuchantes :

Au lendemain des funérailles, l’hebdomadaire qui célèbre chaque semaine “le poids des mots et le choc des photos”, a tiré un numéro qui s’est vendu à plus d’un million d’exemplaires soit le double de son tirage habituel, excusez du peu ! Et il en est de même pour tous les follicules qui ont titré en une sur la cérémonie et le mouvement populaire y afférent. Dans le même temps, les ventes de CD ont littéralement explosé : quelque 600 000 albums sont partis en quelques heures et les affaires continuent bien qu’avec un bémol, les fêtes ayant quelque peu épuisé les larfeuilles. De quoi se frotter les mains chez les épiciers du “star system” !

Mais le nec plus ultra, le fin du fin, la palme, c’est encore l’Église qui se les est offerts.

Cette institution travaille dans la durée ! 2000 ans d’expérience, ça compte et ça permet de préparer l’avenir! Il faut savoir que les admirateurs, les fans, voire les dévots se précipitent et se pressent depuis des semaines à l’église de la Madeleine qui est devenu leur lieu de ralliement. Un pareil flot ininterrompu et qui ne faiblit pas, c’est une manne pour celui qui sait l’exploiter…

Bruno Horaist, le curé de la paroisse flaire l’aubaine. Dans le fond, il suffit de pérenniser le mouvement. Et il va s’y employer.

Or on a déjà fait beaucoup pour tailler à notre rockeur national le costard d’une sorte de réincarnation, d’un avatar de celui dont il portait sur la poitrine la figure symbolique. Un tel personnage mérite bien une messe, voire plusieurs se dit notre brave curé. Aussitôt, aussitôt fait, il déclare incontinent qu’une messe sera dite, le 9 de chaque mois, en hommage à celui qui sut donner tant de bonheur à tant de gens à l’instar du modèle qu’on lui a dessiné. « J’ai vu que les gens déposaient des petits mots sous les petites lampes de l’église. Alors j’ai pensé qu’il fallait organiser dignement ce mouvement spontané, surtout lorsque, pendant la période des fêtes, le défilé des hommages du public n’a pas cessé« , confie-t-il. Il suffit d’ajouter une plaque commémorative sur la grille extérieure ainsi qu’un livre d’or et le tour est joué !

Ainsi pourront se recueillir dans le souvenir de leur idole tous ceux à qui un portefeuille trop plat interdit le voyage aux Antilles. C’est une touchante attention quand même, bien dans l’esprit d’une Église généreuse et attentive au sort des indigents et autres petites gens qui viendront s’agenouiller un dimanche par mois, faire brûler un cierge et verser leur petite obole en passant.

On ne le dit pas encore mais tout le monde y pense, une canonisation est sérieusement à envisager… Car enfin, mère Teresa a-t-elle fait mieux pour le bien des nécessiteux et celui de l’Église ?

Les gestes d’amour de la pasionaria du Christ ont-ils permis à plus de gens de se rapprocher de l’Église que n’a fait la croix du rockeur ? Rien n’est moins sûr. Alors, va pour la canonisation ! Préparons le terrain ! L’église de la Madeleine n’est-elle pas toute désignée pour cela ? Cette pécheresse bafouée puis repentie que le Christ hissa au rang des élus, n’est-elle pas, en quelque sorte, l’ancêtre de l’humble pécheur que fut notre national rockeur ?

Allez, c’est dit, une messe par mois, jusqu’à béatification… et on n’en parle plus !

G. Douspis
Libre Pensée Saumur Janvier 2017

PENDENTIF-CRUCIFIX

En attendant, les idolâtres s’arrachent les crucifix à l’effigie d’un paroissien portant guitare en bandoulière. Une véritable industrie s’est mise en route. C’est la multiplication des pains nouvelle formule. Il y a toujours quelque chose de nouveau sous le soleil de l’Église, il suffit d’adapter les vieilles recettes au goût du jour. Les journaux prétendent que des bijoutiers travaillent nuit et jour et ne parviennent pas à satisfaire la demande. Il faut attendre plusieurs semaines pour obtenir le pendentif !

Tenez-le vous pour dit si d’aventure vous envisagiez…